Dietrich. Le bonheur des tristes

Parfois je refermais mon livre et j’allumais du feu. La flamme tire du bois mort plus de lumière que l’esprit d’une page écrite. Et le feu est, pour l’âme, compagnie plus digne qu’un ami. Car l’ami est un être de chair qui pourrira. L’herbe pourrit, l’arbre pourrit, les bêtes pourrissent, les fruits pourrissent, les hommes pourrissent. Le feu est le seul être vivant qui ne pourrisse pas et sa mort n’a rien de plus horrible que le simple rien. Tout ce qui pourrit veut rentrer dans la terre, mais le cœur de la terre est de feu et le feu reviendra pour aider avec douleur chaque vie à se laver des pourritures de la chair.

Luc Dietrich. Le bonheur des tristes. Folio. 1980