Transapparences

Ignorant,
Oublieux,
Affolé.

Est‑ce dans le corps que je cherche une accroche ?

Je tergiverse,
en ce jour de pluie averse,
à l’heure où l’ombre des êtres
est à sa plus grande extrémité,
au couchant que,
impuissant,
j’assiste aussitôt à la naissance de la nuit
synchrone avec le jour que s’abrège.

A la question du crépuscule,
Où suis‑je ?
la lumière m’éblouit et l’ombre m’embarrasse.

Tandis que la mer, à son tour, m ‘interroge
sur le « Qui suis‑je » d’après les étoiles,
il neige.
Les aiguilles de l’horloge
ne cicatrisent pas
les blessures du passé qui déferlent au présent.

Ah!, cette  mélancolie qui me colle à la  moelle.

Solitude du cœur en cette terre glacée,
Quand le jour va croissant vers la lune vermeille,
Je me cogne à nouveau sur la mer vagabonde
Pris au jeu incessant des mondes en duel.

Au large de la parole,
là où le désir cesse
devant l’étendue des possibles,
je me noie.
Ce n’est pas le Sans Nom, c’est l’Innommable.
Creusant le désaccord avec le monde,
Il n’y a guère que le divin
qui adhère et me raccroche
à la dérive des sentiments.
Le vent n’a pas élu domicile en mon cœur.

En quête d’un retour,
je vais,
vivant mortel,
m’abreuver à la voie lactée de la grande Ourse
Et je m’invente des navires sans équipages
où l’Esprit s’approche de sa sœur la Source.
L’amour est une amarre où mon âme appareille.

Tentation de croire ce que l’on voit,
tentative de voir ce que l’on croit,
c’est à l’issue que la vie déverse son sens.
MAIS
une étoile m’envoie
d’un fil de lumière,
l’éternité,
comme une somme d’éphémères.
Lente émergence à moi-même inconnue,
j’avance vers ce soleil jaillissant du brouillard,
agissant les doutes sans l’usage des masques
car égaré dans l’espace
limpide, sonore et sans fond,
je m’éprends d’infini,
encore et encore…

Ignorant,
même si je loge en son Attente ;
Oublieux,
même si je séjourne en son Souvenir ;
Affolé,
même si je demeure en sa Présence.

Patrick Giles