Castaneda. Quel est ton chemin ?
-Y a-t-il une manière spécifique d’éviter la souffrance ?
-Oui, il existe un moyen.
-Une formule, une méthode, ou quoi ?
-C’est la manière dont tu appréhendes les choses. Ainsi j’étais bien trop impatient, durant mon apprentissage de l’herbe du diable. Je me jetais sur ces choses à la façon dont les enfants se précipitent sur un sucre d’orge. L’herbe du diable n’est qu’un chemin parmi des millions d’autres. N’importe quoi peut servir de chemin. C’est pourquoi il ne faut jamais oublier qu’un chemin est seulement un chemin ; si tu sens que tu ne dois pas le suivre, alors sous aucun prétexte ne continue d’y avancer. Pour obtenir une telle lucidité d’esprit il faut discipliner sa vie. Alors, seulement, tu pourras comprendre que ton chemin n’est qu’un chemin auquel tu peux renoncer si ton cœur le désire sans faire affront à personne, ni à toi ni aux autres. Mais ta décision de poursuivre sur un chemin ou de l’abandonner doit être libre de peur ou d’ambition. Je te préviens, considère chaque chemin en toute liberté et avec une grande attention. Essaie-le autant de fois que tu le jugeras nécessaire. Puis pose-toi, et à toi seul, une question ; une question que seul un vieil homme peut se poser [ ]: « Ce chemin a-t-il un cœur ? Tous les chemins sont les mêmes, ils ne conduisent nulle part. [ ] Ce chemin a-t-il un cœur ? Si oui, le chemin est bon, si non il est inutile. Ces deux chemins ne conduisent nulle part, mais l’un d’entre eux a un cœur et l’autre n’en a pas. L’un est propice à un merveilleux voyage ; aussi longtemps que tu le suis, tu ne fais qu’un avec lui. L’autre te fera maudire ta vie. L’un te rend fort, l’autre t’affaiblit.
Castaneda. L’herbe du diable et la petite fumée. 10/18. 1980
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