La route non empruntée
Deux routes bifurquaient dans un bois jaune
Et au regret de ne pouvoir prendre les deux
Car voyageant seul, je suis resté longtemps
Les yeux fixés sur l’une des deux aussi loin que je le pouvais
Jusqu’à un virage qui se perdait dans les broussailles ;
Alors j’ai suivi l’autre route, tout aussi envisageable
Et peut-être même plus justifiée encore
Parce que recouverte d’herbes ne demandant qu’à être foulées ;
Cependant, ceux qui étaient passés par là
Les avaient empruntées de façon assez semblable.
Et toutes deux en ce matin s’étiraient
Parmi des feuilles qu’aucun pas n’avait encore souillées
Je réservais la première route pour une autre fois
Sachant pourtant qu’un chemin menant à un autre chemin,
Je doutais d’y revenir jamais.
Un jour, dans des années et des années
Je conterai tout cela en soupirant, à savoir que
Deux routes bifurquaient dans un bois, et que moi —
J’ai suivi celle par laquelle on chemine le moins souvent
Et cela a fait toute la différence.
Robert Frost. Mountain Interval, 1916
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