La journée vide
Désormais, c’est certitude, pour en avoir vécu l’épreuve, chaque instant nous porte au sommet, chaque défaite nous permet d’atteindre les cimes et, à l’instar des peintres les plus grands, nous avons appris à découvrir la beauté, toute la beauté du monde, parmi les choses les plus pauvres, les plus délaissées, les plus indigentes. Bien entendu, nous n’avons pas remisé les voyages au grenier. Mais le plus proche sait nous nourrir tout comme le plus lointain. Nous n’allons plus forcément chercher de l’or à l’étranger puisque nous l’avons sous la main, dans la fragilité de quelques mots, dans l’éclat de quelques rires, dans le lit même des solitudes. Nous lançons nos filets dans les rues immédiates et ramenons sans effort les beautés de la vie nue. Pour cela, tout simplement, il nous suffit d’habiter les heures sans gloire et les jours solitaires, il nous suffit d’être là, aux aguets avec, pour seul souci, la merveille de cette vie.
Joël Vernet. La Journée vide. Edition Lettres vives. 2001
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