Il était une foi…

Il était une foi…

« Deux erreurs : Prendre tout littéralement. Prendre tout spirituellement ».
              Blaise Pascal  

Notre histoire, c’est-à-dire l’ensemble de nos influences passées ou présentes, bien plus antédiluvienne qu’on se l’imagine, nous a privé du sacré de la vie faisant de nous des possesseurs du monde et des jouisseurs de ses biens en attente de son dû et asservi par lui au lieu de nous guider librement vers la rencontre de soi-même en relation avec ce qui nous entoure, animé par un sentiment d’amour se mettant à son service.
Pauvre monde que ma richesse intérieure ne nourrit plus mais que ma solitude comble.
L’homme préférant survivre dans l’enclos de la cellule qu’il s’est patiemment construite, étanche à ce qui ne lui ressemble pas et hermétique à ce qui est nouveau, s’est finalement emmuré de son vivant dans ce qui est devenu une forteresse bien protégée au point de ne plus pouvoir s’en extraire.
Puis croyant s’être fait de lui-même et recyclant sans cesse « son » monde où se disputent bénéfices, frustrations et souffrances, il s’est abstrait de tout ce qui le constitue véritablement : sa généalogie, sa génétique, sa génération, sa biologie, sa famille, son éducation, son milieu, sa culture…
Où pourrait-il fuir pour éviter que ce qui advienne soit ?
Vivre ne nous laisse que le temps de boire un verre à la santé de notre illusion.

Au bout du compte, tout converge à penser que je ne suis qu’une poussière d’espace et à m’imaginer infime d’infini. Et dans la clepsydre du temps qu’il me reste à consommer, je veux faire de chaque goutte un breuvage et de chaque moment une jouissance. Ou je prétends à tout ou je ne prétends à rien car ma prétention est une espérance d’expérience à vivre le réel.
Plus de mensonge, plus de fantasme, plus de mythomanie qui m’hypnotisent : « moi » et le monde nous sommes un.
A force de clarifier les reflets que le monde me renvoie, j’en suis parvenu à suivre la fissure dans le miroir. Il s’agit, non plus de se laisser bercer par son propre imaginaire, mais d’enfin oser être qui « je suis ».
C’est parce que je me suis éprouvé à la recherche intérieure que petit à petit une conscience d’un plus grand que soi l’englobant est apparue et que mon système complexe (et complexé) a pu commencer à se simplifier.
L’intention est en chacun et se réveille dès qu’un certain recul sur sa vie se produit quand vivre de souffrances ne suffit plus et qu’un désir de quiétude s’est fertilisé.
Désapprendre, déconstruire et se déshabituer sont alors des passages obligés

Il est souvent troublant de s’apercevoir que sa parole ne soit entendue que par le seul silence d’où elle émerge et c’est une joie rare de partager cela avec son semblable. Il est plus courant de trouver le long de sa route incompréhension, jugement et rejet.
Celui qui croit au jugement sera jugé à son tour. Moi je crois à l’amour et serai donc aimé en retour. Car à quoi sert de voir la paille dans mon œil si ce n’est que pour davantage enorgueillir ton ego ? Il n’est personne d’autre que moi pour connaître qui je suis.
Toutes ces poutres qui ont contribué à l’échafaudage de ma démarche sont, elles aussi, sacrées puisqu’appartenant à cette vie.
Reconnaître le sacré de la vie c’est cela : c’est voir avec émerveillement, c’est ressentir avec joie et respirer avec enthousiasme. C’est passer à l’improviste d’un état provisoire d’existence humaine à une conscience éternelle d’être puis d’en faire un feu d’artifice offert à tous les vents dont il ne restera même pas de cendres.
Tout juste, à peine, une légère apparition.

Patrick Giles