Guardini. De la mélancolie
On perd de vue le point capital : la limite, l’élément proprement humain. Comprendre que l’on n’est pas le monde, mais plus que lui. Non pas une fraction de la nature, mais autre qu’elle par essence. Non pas une vague dans le torrent, un atome dans le tourbillon, un organe dans le grand tout, mais un esprit, une personne qui a pouvoir sur elle-même, responsable d’elle-même ; l’image de Dieu, soumise à son appel et ayant reçu de lui la liberté en ce monde. Mais qui, d’autre part, n’est pas Dieu. Non pas une parcelle de Dieu, non pas une concrétisation de sa plénitude infinie, non pas une émanation fluant de son esprit – peu importe de quelle façon l’on réduit la différence essentielle, absolue, entre Dieu et l’homme – mais « absolument moins » que lui : sa créature.
Romano Guardini. De la mélancolie. Points Seuil. 1992
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