Dürckheim. Le centre de l’être
On ne pourrait pas parler de la transcendance si elle ne se manifestait pas dans tout ce qui est vivant. La Vie n’est pas la somme de tout ce qui est vivant ; la Vie, c’est l’essence de tout ce qui est vivant. La Vie se manifeste dans tout ce qui est vivant. Et dans tout ce qui vit, la Vie se manifeste dans trois aspects : la plénitude, l’ordre et l’unité.
La plénitude se révèle dans la force de vivre. L’ordre se révèle dans l’élan qui pousse tout ce qui vit vers sa forme. Et l’unité se révèle dans la nostalgie de l’union qui, pour l’homme, est la nostalgie de l’amour.
Chez l’homme cette trinité d’aspects représente l’ensemble des désirs les plus profonds. C’est le désir de vivre et de survivre. C’est vivre d’une façon qui a un sens. Et vivre, non pas dans l’isolement mais dans la communauté humaine.
Les trois grandes détresses de l’homme découlent de cette trinité. C’est la peur de l’annihilation, de la destruction de la vie. C’est le désespoir vis-à-vis de l’absurde, le non-sens. Et la tristesse dans l’isolement.
La transcendance est une réalité qui transcende la vie naturelle. Et la transcendance se manifeste exactement là où l’homme dépasse les limites de son moi naturel. En acceptant la destruction, l’absurde ou l’isolement, l’homme a la chance d’être touché par quelque chose qui est au-delà de la vie et de la mort, au-delà du sens et du non-sens, au-delà de l’isolement ou de l’abri qu’il trouve dans une communauté. Expérience inouïe, incroyable, inattendue mais authentique dans laquelle l’homme éprouve quelque chose en quoi il peut faire confiance. Si, dans son esprit déformé par la conscience objectivante, il tombe dans le piège du scientifique, du psychologue ou du théologien, il va connaître les trois grands doutes qui gâchent le contenu de cette expérience.
Karlfried Graf Dürckheim. Le centre de l’être. Spiritualités vivantes. 1994
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