H. J. Lim. La vie parfaite

Je salue le public. Les applaudissements s’estompent. Un homme tousse. Le piano attend. Je m’assois. Et alors, il y a la musique. Et tout advient. La musique, c’est eux, c’est moi, c’est vous, c’est nous qui cherchons le silence.
Je n’oublie rien, tout est là. J’ai chaud, j’ai soif, je dois aller là où l’on ne va pas, je dois retrouver tout ce que l’on ne sait plus, ce qui fut perdu, le ramener, tout ce en quoi l’on a cru ; je veux bien mourir, prendre le risque, être nue, parce que j’ai l’espérance de cet immense lac de silence frais où mon corps essoré par la joie s’abandonne. Cela arrive parfois. Alors, c’est la vie parfaite qui tend sa paume et caresse ma joue baignée de larmes. Je me rencontre, il n’y a plus rien à craindre, la lumière est là que jamais l’ombre ne saura éteindre. La lumière, la musique.
Ce qui fut blessé, la tristesse dans les poumons gorgés de peine, tout s’efface. J’entre dans le monde par l’intérieur, et je suis libre. Libre.

H.J. Lim. Le son du silence. Livre de poche. 2019